L’intégration des travailleurs en situation de handicap constitue un levier pour une administration publique plus humaine, responsable et innovante. Le 22 mai, après huit mois de travaux, la Commission des lois du Sénat adoptait ainsi 28 propositions dévoilées par sa Mission d’information pour garantir un « nouveau souffle à la politique du handicap dans la fonction publique ». Celles-ci viendront nourrir le projet de loi de transformation de la fonction publique dont l’examen est prévu le 12 juin prochain.
Lever les freins à l’expression des compétences
Très souvent, les actions favorables à l’inclusion des travailleurs en situation de handicap reposent sur « l’engagement personnel de certains élus, managers ou agents », dont le rapport d’information salue le travail, les présentant comme de « véritables clefs de voûte de la politique du handicap » au quotidien. Le Sénat prône la consolidation de cette dynamique à travers la désignation systématique de référents handicap dans toutes les administrations pour mieux répondre aux besoins des agents.
Si la fonction publique territoriale atteint un meilleur taux d’emploi (6,76%) que la fonction publique d’Etat ou la fonction publique hospitalière, le recrutement y demeure tout autant fragilisé par les contraintes inhérentes au système actuel. Sont notamment visés par les rapporteurs :
- des voies d’accès à la fonction publique mal adaptées au handicap,
- un manque de coordination des acteurs de l’insertion,
- des politiques de prévention du handicap insuffisantes « alors même que la santé au travail constitue l’un des principaux enjeux de la fonction publique » (vieillissement des effectifs, pénurie de médecins de prévention, lourdeurs des procédures de reclassement, manque de mobilité dans la fonction publique...)
Pour lever ces freins à l’expression des compétences, les mesures avancées par le Sénat constituent des pistes propres à susciter l’intérêt des CCAS/CIAS comme des autres acteurs locaux :
- un recours facilité aux contrats de recrutement ad hoc (exemptant les travailleurs en situation de handicap du concours administratif) ;
- une titularisation des agents handicapés à l’issue de leur contrat d’apprentissage (sans concours administratif) ;
- un décloisonnement des acteurs de l’insertion (Maisons Départementales des Personnes Handicapées, Pôle emploi et Cap emploi) en les incitant à mieux collaborer avec les employeurs publics, tels que les CCAS/CIAS.
Réinvestir la mission de conseil et d’accompagnement du FIPHFP
Pour le Sénat, la fragilisation de l’équilibre financier du Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) appelle des mesures d’urgence afin d’assurer la pérennité de ses interventions. Pour mémoire, au-delà des aides financières, le Fonds accompagne les employeurs publics à travers une palette d’actions mises en œuvre par des délégués locaux.
Instaurer des processus de recrutement inclusifs, repenser l’environnement de travail, conduire des études ergonomiques, sensibiliser le collectif… plusieurs adhérents de l’Unccas présentent la démarche du FIPHFP comme un « activateur de progrès » pour l’ensemble des collaborateurs, au-delà des seuls agents en situation de handicap.
Dès lors, relayant l’inquiétude des travailleurs handicapés et des employeurs publics quant à la réduction de ces aides, le rapport préconise d’expérimenter, dès la prochaine loi de finances, une réforme du modèle économique du Fonds par :
- la création d’une cotisation universelle assise sur la masse salariale des employeurs publics ;
- la création d’un « bonus / malus » pour valoriser les efforts des employeurs.
Pour aider les employeurs à se placer dans des perspectives innovantes, les solutions émises visent également à rapprocher le Fonds des territoires (en s’appuyant notamment sur des délégués additionnels) ou encore à allonger de trois à quatre ans les conventions pluriannuelles sollicitées par les employeurs.
Ces recommandations semblent avoir trouvé un premier écho lors du Conseil commun de la fonction publique du 4 juin. Outre la présentation de quatre projets de décrets destinés à mettre en œuvre la loi « Avenir professionnel », Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics, a confirmé la hausse du budget du FIPHFP à 130 millions d’euros par ans contre une centaine aujourd’hui.
Pour aller plus loin
- Rapport d’information n°520 au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale sur le handicap dans la fonction publique, par Catherine Di Folco et Didier Marie, Sénateurs
- Handi-PACTES du FIPHFP
- Catalogue des interventions du FIPHFP
Secteur Privé
- Décret n° 2019-521 du 27 mai 2019 « relatif à la mise en œuvre de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés par application d’un accord agréé »
- Décret n° 2019-522 du 27 mai 2019« relatif à la déclaration obligatoire d’emploi des travailleurs handicapés »
- Décret n° 2019-523 du 27 mai 2019 « fixant les modalités de calcul de la contribution due au titre de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés »
Contact
Florence Angier
Juriste et chargée de mission « handicap – politiques sociales »
fangier@unccas.org
Photo : Wikimedia Commons / xiquinhosilva