Les questions soulevées par la politique sociale intercommunale et par le CIAS - instrument privilégié pour la porter - sont nombreuses : comment connaître les besoins et prioriser les actions ? Comment se coordonner avec les institutions municipales ? Quels partenariats nouer avec les autres acteurs (associations, établissements de santé...) ? Pour y répondre, l’UNCCAS publie une série de retours d’expériences d’intercommunalités ayant fait ce choix et décrit leur méthodologie, leurs moyens, leurs perspectives... Premier exemple dans la Marne, sur le territoire des Coteaux Sézannais.
Description / Fonctionnement de l'action
Une dimension intercommunale de l’action sociale complexe à intégrer
Comme de nombreuses communautés de communes, la communauté de communes des Coteaux Sézannais, dans la Marne, est organisée autour d’un bourg centre : Sézanne. Celui-ci regroupe une grande partie de la population intercommunale (5 300 des 10 000 habitants de la communauté de communes vivent à Sézanne), des activités et des services mais aussi une majorité des difficultés sociales.
Dès la création du District en 1992, les élus se sont posé la question de l’intégration de la compétence sociale. Toutefois, même si les compétences traditionnelles relevant de problématiques techniques communes (ordures ménagères, service incendie, assainissement, voieries…), ont permis de rassembler « facilement » les différentes communes, la question de l’action sociale historiquement ancrée dans la sphère communale, a semblé plus complexe à intégrer au sein de la communauté.
Définir l’action sociale locale pour dessiner le paysage social intercommunal
Face à ces difficultés, les élus ont mis en place une démarche participative, prenant notamment la forme de groupes de travail entre les 15 communes du territoire, avec pour objectifs de partager la même définition de l’action sociale locale et de dessiner le paysage intercommunal de l’action sociale.
Cette réflexion a permis :
- de définir l’action sociale locale afin de partir sur des principes communs à toutes les communes (proximité, accessibilité etc.),
- d’établir un diagnostic de l’action sociale, commune par commune,
- de rechercher un ou plusieurs éléments de politique sociale fédérant l’ensemble des communes afin de permettre une création facile et rapide du CIAS,
- de fixer un objectif commun de conduite d’une réflexion intercommunale pour la mise en œuvre progressive d’une politique sociale facultative intercommunale, basée sur une analyse des besoins sociaux.
A l’issue de ces réflexions, le 1er janvier 1996, le CIAS des Coteaux Sézannais a pu être créé. Sa compétence était alors limitée à l’aide sociale légale. Les CCAS de toutes les communes membres de la Communauté de Communes furent maintenus.
Poursuivre la réflexion avec tous les acteurs du social et les CCAS du territoire
Une fois le CIAS créé, l’ensemble des élus a souhaité poursuivre la réflexion permettant de mettre en œuvre une politique sociale intercommunale.
Le Conseil d’Administration du CIAS, composé d’au moins un représentant de chaque commune, a ainsi conduit la réflexion en étroite collaboration avec les élus, les représentants des associations et les professionnels de l’action sociale. La ville centre, Sézanne, n’a pas imposé le transfert de l’ensemble de ses services à l’intercommunalité mais a présenté, chaque année, le bilan de son action sociale facultative dans le cadre du conseil d’administration du CIAS.
Parallèlement, la commission permanente du CIAS a été invitée à chacune des réunions mensuelles de la commission permanente du CCAS de Sézanne afin que chacun puisse découvrir la réalité de l’action sociale de terrain.
3 ABS et de nombreuses discussions indispensables pour confirmer une vision commune du social
Trois analyses des besoins sociaux ont été réalisées (personnes âgées et personnes handicapées en 2002/2003, personnes en difficulté en 2004/2005, petite enfance en 2006/2007). A l’issue de cette période de découverte, de partages d’expérience, d’interrogation et d’analyse, les élus de la communauté ont constaté qu’ils partageaient la même vision de l’action sociale intercommunale orientée vers la notion de services de proximité rendus à l’ensemble de la population de la communauté.
Ils ont constaté que l’action sociale intercommunale était un facteur important de cohésion et surtout d’attractivité du territoire. Fin 2006, ont été définies d’intérêt communautaire : « toutes les actions au titre de l’aide sociale légale et de l’action sociale facultative ».
Dès 2007, les CCAS ont été supprimés et le personnel du CCAS de Sézanne a intégré le CIAS.
Un CIAS qui ne cesse de se développer devient une ressource indispensable
En 2006, dix ans après sa création, le CIAS des Coteaux Sézannais rassemblait 16 communes pour 9 000 habitants avec un budget d’1,65 million d’euros et 55 agents. Le budget alloué aux actions sociales intercommunales coordonnées par le CIAS était couvert à 34% par la communauté de communes.
Aujourd’hui, ce sont 65 personnes qui sont employées par le CIAS et un budget de 2,4 millions d’euros, financé à un tiers par l’intercommunalité. Les autres dépenses sont prises en charge par la Caisse d’Allocations Familiales, la Mutualité Sociale Agricole etc.
Le CIAS, situé à Sézanne, en zone rurale, regroupe l’ensemble des services suivants :
- Personnes âgées (service d’aide et d’accompagnement à domicile, portage de repas, petit bricolage, petit jardinage),
- Petite enfance (crèche familiale, structure multi-accueil, lieu d’accueil enfants-parents et un réseau d’assistantes maternelles),
- Service social, aides facultatives, aide à la constitution des demandes de RSA, micro-crédit, etc.
Le CIAS est devenu une ressource indispensable à plusieurs niveaux, comme nous l’explique sa directrice, Myriam Tinturier :
- Attractivité du territoire : « avant de s’installer dans une commune, les familles nous interrogent sur son appartenance ou non à la communauté de communes et sur l’accès ou non aux services proposés par le CIAS »,
- Cohésion : « l’intercommunalité sociale apporte une dimension humaine permettant une meilleure compréhension mutuelle et surtout le même niveau de services pour toutes les communes »,
- Guichet unique de proximité : « tous les habitants de la communauté disposent d’un service de proximité accessible à tous dans les mêmes conditions »,
- Amplification du rôle de tous les maires : « chaque maire peut apporter une réponse en terme de services à ses habitants (crèche, personnes âgées, difficultés sociales…), quelle que soit l’importance de sa commune »,
- Développement du partenariat : « les organismes sociaux (CAF, CRAM, Conseil Départemental) sont de plus en plus sensibles à la notion d’intercommunalité sociale et favorisent financièrement les projets intercommunaux »,
- Reconnaissance accrue du rôle de l’action sociale locale : « le CIAS est reconnu comme un acteur essentiel de l’action sociale locale aux côtés des services du département. Il est aussi un appui pour les maires des petites communes parfois démunis face à certaines situations sociales ».
L’expérience réussie des Coteaux Sézannais démontre que l’action sociale intercommunale constitue un facteur important de cohésion sociale et est un élément essentiel d’attractivité pour chaque commune de la communauté et donc pour la communauté elle-même. La réflexion, l’analyse et le dialogue entre les différentes communes a favorisé un développement progressif des projets intercommunaux permettant d’harmoniser les pratiques. L’action sociale intercommunale donne ainsi à la communauté de communes une dimension humaine, et à tous ses habitants, un sentiment d’appartenance à cette même communauté.
Perspectives
Une fusion de la communauté de communes des Coteaux Sézannais (10 000 habitants) avec la Communauté de communes des Portes de Champagne (environ 6 000 habitants), et la Communauté de communes du Pays d’Anglure (environ 7 000 habitants) est prévue à l’horizon 2017. Elle aboutira vraisemblablement à la création d’une nouvelle communauté de communes dont le nom n’a pas encore été choisi.
A ce jour, aucun CIAS, hormis celui des Coteaux Sézannais, n’existe sur les territoires concernés par la fusion. La compétence optionnelle « action sociale d’intérêt communautaire » devrait être reprise par le nouvel EPCI. Il est cependant trop tôt pour savoir si celle-ci sera exercée via un CIAS et si le CIAS des Coteaux Sézannais élargira son champ d’action ou disparaitra.
En amont de la fusion, les territoires concernés entament un diagnostic commun. Ils souhaitent établir un état des lieux de l’existant pour développer progressivement leurs actions à l’échelle de la nouvelle intercommunalité. Un tableau de bord ayant vocation à devenir un véritable observatoire social intercommunal est même en cours de réflexion
En Résumé
- Des élus qui prennent le temps de la réflexion pour développer des projets en adéquation avec les besoins du territoire,
- Un CIAS créé il y a plus de 20 ans au cœur de la communauté de communes avec maintien des CCAS,
- Les CCAS supprimés 10 ans après la création du CIAS,
- Les agents du CCAS de Sézanne désormais rattachés au CIAS,
- Un budget annuel qui passe de 1,6 à 2,4 millions d’euros après 10 années d’existence,
- Le CIAS vu comme une ressource indispensable pour les habitants,
- Une fusion de 3 intercommunalités qui se prépare et ne devrait pas remettre en cause l’action sociale portée par le CIAS.
+ d’informations sur la création du CIAS ?
Participez à la journée d’information organisée par l’UNCCAS et Mairie-Conseils
« Faut il créer un CIAS ? », le 12 octobre à Paris
Photo : Centre-ville de Saudoy, membre de la Communauté de Communes des Coteaux Sézannais
Source : Wikimedia Commons / François GOGLINS
Les partenaires
Partenaires opérationnels
Conseil Départemental, Caisse d’Allocations Familiales, Caisse Régionale d’Assurance Maladie, Caisses de retraite, Caisse Primaire d’Assurance Maladie, Mutualité Sociale Agricole, Union Générale de Retraite par Répartition, France Domicile, Centre Local d’Information et de Coordination, Banque Alimentaire, Secours Catholique, Croix Rouge, Secours Populaire, EDF, Associations d’insertion, Organismes logeurs (Plurial Novilia), UNA, Association des Maires de la Marne.
Ils financent l'action
Conseil Départemental, Caisse d’Allocations Familiales et caisses de retraite, les mutuelles, la Mutualité Sociale Agricole, l’Union Générale de Retraite par Répartition, Caisse Régionale d’Assurance Maladie, l’Etat (pour le dispositif ALT logement d’urgence)