A l’occasion de la Matinée 2016 des Territoires, le 18 octobre, durant laquelle la dernière enquête de l’UNCCAS sur les CIAS a été publiée, nous nous sommes entretenus avec Estelle Grelier, Secrétaire d’Etat chargée des Collectivités Territoriales. L’occasion de recueillir son point de vue sur le devenir de l’action sociale locale, dans le nouveau contexte généré par la Loi NOTRe.
Quel message adresseriez-vous aux élus intercommunaux pour les inciter à se saisir pleinement de la question sociale ?
C’est un constat largement partagé : les transformations de la société ont profondément redéfini la question sociale au cours des dernières décennies. L’évolution du marché du travail et le vieillissement de la population ont accru la demande sociale. L’apparition de nouveaux publics en situation de vulnérabilité renforce le besoin d’accompagnement social. Face à ces enjeux, les élus locaux sont en première ligne.
Le versement d’aides individuelles ne suffit pas. La question sociale appelle une réponse globale, à l’échelle des bassins de vie, mobilisant tous les champs de l’action publique locale. Pour porter ces politiques de développement social, l’intercommunalité constitue un échelon pertinent d’observation, d’action et de partenariat.
La loi NOTRe a introduit beaucoup de questionnements à l’endroit des CIAS. Croyez-vous en cet outil ? Pensez-vous qu’il doive évoluer et si oui, pourquoi et comment ?
L’action sociale intercommunale connaît une montée en charge très progressive : on dénombre aujourd’hui un peu plus de 400 CIAS (pour 2062 communautés) mais les EPCI intervenaient déjà par d’autres moyens. Ces établissements sociaux ont fait preuve d’une très grande souplesse et sont en mesure de s’adapter à toutes les situations locales. Ils ont également démontré leur capacité à s’adapter aux fusions d’EPCI mises en œuvre en 2015.
Le CIAS a de nombreux avantages. Il permet à la communauté de porter les équipements et services que les CCAS ne sont pas en mesure d’assumer. Il permet de mener des analyses de besoins sociaux efficaces à une échelle pertinente, celle du bassin de vie. Il constitue un relai essentiel pour les mairies et les CCAS : centre d’information, ingénierie, formation.
Dans le champ social, la loi NOTRe fait preuve d’équilibre : elle facilite une meilleure organisation de l’action sociale mais laisse toute latitude aux territoires pour s’organiser. Toutefois, il est essentiel que les communautés appelées à fusionner préparent ces réorganisations en amont.
Selon vous, dans le champ social, la crainte d’une perte de proximité avec l’usager induite par l’étendue des nouveaux territoires intercommunaux est-elle fondée ?
L’intercommunalité est un échelon de proximité ! Rappelons que ce sont les élus municipaux qui siègent au conseil communautaire. Les extensions de périmètre ne remettent pas en cause le lien avec les publics, ni l’impératif d’égalité de traitement : au contraire, ils donnent à l’intercommunalité la taille critique pour étendre et renforcer les services à la population.
Dès lors, les EPCI sont les interlocuteurs privilégiés des acteurs départementaux pour coordonner et territorialiser leurs politiques sociales dans un périmètre d’intervention communs.
Nous devons faire confiance à l’intelligence des territoires : rien n’empêche les communautés d’organiser, dans le champ social ou ailleurs, une action territorialisée. De plus, l’action sociale est une compétence d’intérêt communautaire. Les communes et la communauté ont toute latitude pour s’organiser entre elles et définir leurs rôles respectifs.
Le lien CCAS-CIAS vous semble-t-il pertinent, indispensable, accessoire ?
Cette question doit être posée dans chaque territoire : un CIAS cantonné à la gestion d’un équipement ou d’un service n’a pas le même lien avec les CCAS qu’un centre intercommunal pilote d’une politique globale de développement social.
Symétriquement, tous les CCAS n’ont pas vocation à être maintenus : trop souvent, dans les petites communes, les centres d’action sociale sont dépourvus de moyens d’agir. Dans d’autres communes, urbaines ou rurales, le CCAS est opérationnel et joue un rôle essentiel de proximité.
C’est en fonction de la réalité du territoire, sur la base d’une analyse approfondie des besoins sociaux, que les élus doivent organiser l’architecture et les missions de l’action sociale.