Le projet inter écran d’âge est un projet issu de la réflexion d’un collectif de soignants de l’hôpital local de Nontron, de l’EHPAD de St Pardoux la Rivière, de l’unité Alzheimer et du travail des élèves du collège de Tocane St Apre. Ce dispositif a pour objet l’animation et la stimulation cognitive des personnes âgées à domicile. De plus, il permet la mise en place d’un suivi régulier adapté aux troubles mais aussi aux capacités de chacun.
N’hésitez pas cependant à vous inspirer de cette fiche pour imaginer un projet similaire.
Contexte
Le canton de Nontron est situé au Nord du département de la Dordogne. La population y est plus âgée que dans le reste du département. En conséquent, dans un futur proche, il y a statistiquement plus de risques que le canton soit amené à s’occuper de personnes atteintes de démences de type Alzheimer ou de pathologies apparentées.
Grâce à une étude réalisée par une équipe de l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (INSERM), le suivi d’un groupe de personnes âgées vivant en Dordogne et en Gironde, permet de mieux connaître le vieillissement cérébral normal et pathologique des personnes âgées (étude Paquid). Les données recueillies auprès de personnes vivant à domicile ou en institution permettent d’estimer le nombre de personnes atteintes de démences et notamment de la maladie d’Alzheimer. Ainsi, on estime à près de 8 000, le nombre de personnes atteintes de pathologies démentielles en Dordogne en 2005.
Le CIAS de Nontron gère depuis 1979 un service prestataire d’aide à domicile. La structure compte actuellement une soixantaine d’agents. Dans le cadre de sa mission d’aide et d’accompagnement au domicile - par l’intermédiaire de ses auxiliaires de vie - le CIAS est souvent à l’origine de la constatation et de signalements de symptômes démentiels chez ses bénéficiaires. Cependant, faute d’outils fiables en matière de mesures et de détection, il est très difficile de solliciter la famille ou le médecin pour effectuer un diagnostic plus poussé. Souvent, la maladie est diagnostiquée plus tardivement, au moment où les troubles handicapent la personne dans son quotidien. De plus, lorsque la personne a encore conscience de ses troubles, elle en souffre, ce qui occasionne de nombreuses manifestations de stress mais aussi des frustrations et de l’épuisement autant de la part des aidants familiaux que des professionnels intervenant au domicile.
Devant ce constat, il était essentiel de mettre en oeuvre des moyens et des outils permettant la détection précoce de la maladie et la coordination avec les autres professionnels intervenant sur le canton.
Description / Fonctionnement de l'action
Dès juin 2008, le conseil d’administration du CIAS de Nontron par l’intermédiaire de son directeur et de deux responsables de secteur, a souhaité s’impliquer dans ce projet pensé au départ pour l’institution. Néanmoins, l’adaptation au secteur du domicile, ne pourra qu’enrichir ce projet grâce à l’expérience et aux observations des professionnels du domicile notamment par un recueil d’informations (histoire de vie, habitudes de vie, photos...) facilitant la rapide prise en soin du patient lors d’un éventuel passage en institution.
Inter écran d’âge trouve tout son sens en termes d’accompagnement, d’animation, de stimulation grâce à différents modules composant le programme informatique (un module d’animation composé de diaporama, vidéos, chansons, karaoké, jeux divers, quizz...). L’aspect pratique de l’ordinateur portable est un facilitateur de lien social entre l’animatrice à domicile et le bénéficiaire qui peut également, s’il en a les capacités, l’utiliser seul ou en collaboration avec la responsable de secteur ou l’auxiliaire de vie.
Par ailleurs, l’intérêt de cette démarche pour le CIAS est avant tout d’animer une action de prévention auprès de personnes, pouvant présenter des troubles cognitifs. Pour cela, le logiciel bénéficie également, de deux modules de stimulation.
Pour animer cette action, deux responsables de secteur du CIAS, en lien avec une psychologue proposent aux personnes âgées à domicile, plusieurs exercices évaluant différentes dimensions de la mémoire : la mémoire sémantique et la mémoire de travail. En fonction des résultats obtenus, ces données sont consignées et pourront faire l’objet d’un signalement auprès des médecins intervenant dans les familles concernées.
La phase de test :
Il a été décidé une phase de test de 3 mois, durant laquelle les critères nécessaires à une évaluation objective du projet seront respectés au maximum. Pour ce faire, deux groupes ont été constitués : un groupe de personnes stimulées et un groupe témoin (non stimulé). Cette distinction à pour objectif d’assurer que les bénéfices observés seront bien dû aux séances de stimulation. Les deux groupe ont passé des tests neuropsychologique et ce dans la poursuite de 3 objectifs principaux :
Evaluer les bénéfices des séances de stimulation sur les fonctions cognitives visées en proposant une batterie de tests avant et 3 mois après la mise en place des séances de stimulation.
Proposer un premier dépistage des personnes risquant de développer une démence de type Alzheimer ou un autre type de démences.
Pouvoir proposer aux patients une large palette de tests neuropsychologiques afin de commencer à cerner ses capacités cognitives restantes.
Afin de mettre en place un réel accompagnement et un suivi régulier des personnes, celle-ci ont été rencontrées une fois par semaine durant 30 minutes. A chaque séance, l’animateur devra effectuer 3 tâches de 10 minutes en alternant entre les exercices de stimulation et l’animation. En effet, il est important de proposer au patient un moment de détente entre 2 tâches de stimulation. Parmi les tâches de stimulation, on retrouve celles appartenant à la mémoire sémantique et celles correspondant à la mémoire de travail.
La mémoire sémantique (« c’est ce que je sais »). Elle fait appel aux concepts et aux savoirs culturels. C’est la mémoire des faits historiques, des règles de grammaire, des savoirs acquis. Ex : Images/sons (association d’images et de sons), images /mots (association d’images et de mots), quizz sur les départements français, sur les capitales européennes, sur les métiers...
La mémoire de travail : C’est un système de maintien et de manipulation temporaire d’informations nécessaire à la réalisation d’activités cognitives complexes à des fins immédiates. Ex : les puzzles, images couplées, chronologie des images (remettre dans l’ordre les images), stroop (tâche d’inhibition)...
L’animation : En fonction des goûts et des histoires de vie de chacun. Ex : Diaporama de chanson, vidéo, musiques...
La semaine suivante, l’animateur refait une des deux tâches de stimulation effectuée la semaine précédente puis en commence une nouvelle en alternant entre les tâches de mémoire sémantique et celles de mémoire de travail. L’objectif étant de rassurer la personne en lui faisant faire un exercice qu’elle a déjà fait.
A la fin de chaque séance, l’animateur remplit une fiche d’observation lui permettant de noter ses ressentis concernant la séance écoulée. Sur cette fiche, apparaissent des données concernant les exercices effectués, leur déroulement, le temps mis, leur réussite ou non mais aussi des données concernant le comportement de la personne, son humeur, ses envies, son état physique et son humeur... L’objectif de ces fiches est de pouvoir évaluer d’un point de vue qualitatif les différentes rencontres et de se rendre compte de l’évolution de la personne au cours des séances.
Bilan
Ce dispositif est actuellement en phase de test. Une fois finalisé il pourra être démultiplié. En effet, à l’aide d’un recueil d’informations concernant les goûts, les habitudes et l’histoire de la personne, il sera possible d’adapter le logiciel à chacune des personnes chez qui le CIAS intervient. Tout en respectant les règles de la confidentialité, un dossier propre à chaque personne sera créé. Dans ce fichier sera intégré : des photos de familles, des vidéos personnelles, des musiques, des films...et ceci, afin de personnaliser et d’individualiser chaque interventions auprès des bénéficiaires. Ce projet constituera un véritable outil en matière de prévention et de coordination au niveau des équipes pluridisciplinaires intervenant sur un même secteur géographique.Les avancées technologiques, permettront à l’avenir de faire évoluer le programme, toujours dans l’objectif de stimuler la mémoire et de faciliter le dépistage de pathologies démentielles grâce aux compétences en gérontologie mais aussi en neuropsychologie de la psychologue. A l’avenir, le logiciel disposera des fonctionnalités suivantes :
Fichier individualisé (adapté aux goûts et aux vécus des personnes (photos familiales, genre musical préféré, ...),
Mesure du temps de réponse du bénéficiaire à une question pour pouvoir suivre son évolution et notamment détecter un début de déclin.
Traçabilité des observations (comportements de la personne, humeur, verbalisation, ressentis...)
Les avancées technologiques, donneront la possibilité de faire évoluer la mission de préservation du lien social vers des activités interactives par le biais de clés 3G (connexion internet) depuis n’importe quel lieu de résidence y compris en milieu rural. Cette opportunité donnera l’occasion à des bénéficiaires éloignés physiquement de leur famille, de converser et d’échanger en temps réel à l’aide d’une webcam.
Moyens
Moyens humains
2 responsables de secteur à 6 h / hebdo, chargées d’animer les séances auprès des bénéficiaires durant la phase de test.
1 psychologue : chargée de former les responsables et les auxiliaires de vie au logiciel et à l’évaluation de premier niveau.
Les auxiliaires de vie détenant le DEAVS (Diplôme d’Etat d’Auxiliaire de Vie)
Coût total du projet
Budget prévisionnel annuel : 25 000 euros
Les partenaires
Partenaires opérationnels
Le collectif de soignants de l’hôpital local de Nontron, de l’EHPAD de St Pardoux la Rivière, de l’unité Alzheimer et du travail des élèves du collège de Tocane St Apre
Les observations du CCAS/CIAS
Ce dispositif est né d’un réel besoin d’outils permettant la détection précoce de la maladie et la coordination avec les autres professionnels intervenant sur le canton. Créé de manière collaborative, cet outil est évolutif en fonction des usages et des besoins des équipes.
Ce dispositif a remporté, le 15 décembre 2009, un prix de la Fondation Pfizer France, dans le cadre du prix « Apprenons la santé » en soutient du plan présidentiel Alzheimer 2008-2012.
Photo : Wikimedia Commons / Jbardini