Faisant suite au rapport Isolement des personnes âgées, les effets du confinement publié début juin 2020 sur les impacts du premier confinement et l’isolement des personnes âgées, un nouveau rapport des petits frères des Pauvres, réalisé à partir d’une étude qualitative réalisée en collaboration avec le Cercle Vulnérabilités et Société auprès d’une centaine de personnes âgées, de professionnels (dont des agents de CCAS/CIAS), d’aidants et de bénévoles vient enrichir la compréhension du vécu des personnes âgées, leurs difficultés, leurs souffrances et les inégalités exacerbées par la crise sanitaire.
Les fragilités communes à tous les âges, à savoir les nombreuses détresses économiques, sociales, psychologiques ressortent au travers des mêmes maux : isolement social, privation de liens… Et la précarité agit comme un facteur inexorable d’aggravation.
Les grands enseignements tirés du premier rapport de juin 2020
Le premier confinement a entraîné une profonde modification des relations sociales avec une intensification des relations familiales et une baisse d’intensité des relations amicales et de voisinage
- 720 000 personnes âgées n’ont eu aucun contact avec leur famille durant le confinement et 650 000 personnes âgées n’ont eu aucun confident.
Un ressenti de la solitude en hausse (par rapport à la précédente étude de 2019)
- 32 % des Français de 60 ans et plus (+ 5%) ont ressenti de la solitude tous les jours ou souvent, soit 5,7 millions de personnes. 13 % (+ 4%) ont ressenti cette solitude de façon régulière. Le manque le plus important a été de ne pas voir ses proches.
Des sorties limitées, même après le déconfinement
- 15 % des 60 ans et plus, soit 2,5 millions de personnes ne sont jamais sorties pendant le confinement.
- A partir du déconfinement, 80 % ont continué à limiter sorties et contacts et plus de 830 000 personnes âgées ne souhaitaient pas sortir.
- Le confinement a généré un impact négatif sur la santé mentale pour 41 % des personnes âgées et 31 % sur la santé physique.
Une solidarité en trompe l’œil
- 69 % des personnes âgées ont constaté un élan de solidarité envers eux pendant la crise.
- 52 % des 60 ans et plus n’ont reçu aucune proposition d’aide.
Une fracture ou exclusion numérique marquée
- 4,1 millions de 60 ans et plus n’utilisent jamais Internet, surtout les plus âgés et les plus modestes.
- Pour 87 % des non-internautes, le numérique n’a pas été un manque. Pour les aînés internautes, le numérique est utile mais n’a pas été jugé indispensable pour supporter le confinement.
L’objectif du rapport de mars 2021
En vue d’analyser les effets de la crise sanitaire sur les personnes âgées, l’enquête a été menée dans cinq régions : Hauts-de-France, Grand-Est-, Île-de-France, Bretagne et Occitanie.
121 personnes âgées de plus de 60 ans ont accepté de répondre à l’enquête dont un peu plus de la moitié réside à domicile (53 %) et l’autre en Ehpad, en résidence ou pour quelques rares personnes en habitat alternatif (45%). 80 % de ces personnes se trouvent en zone urbaine et 20 % en zone rurale.
22 % des personnes interrogées ont un revenu inférieur à 1 000 €, 32 % un revenu entre 1 000 € et 2 000 €, 28 % avec un revenu supérieur à 2 000 €. De nombreuses personnes âgées n’ont pas souhaité communiquer leurs revenus (tutelle, curatelle, méconnaissance, refus de communiquer sa tranche de revenus).
36 % signalent avoir l’expérience de la maladie ou du handicap pour eux-mêmes ou un proche.
L’enquête est complétée par dix focus groupes organisés avec des professionnels médico-sociaux (22 professionnels médico-sociaux mobilisés durant la phase de pandémie, soit au domicile, soit en établissement ou foyer : auxiliaires de vie, infirmières, responsables de SAAD, psychologiques, responsables de CLIC, directeurs d’établissement, gériatres, médecins, assistantes sociales…), dont des agents de CCAS/CIAS, et des experts et bénévoles impliqués dans la problématique des solidarités de proximité (44 personnes : bénévoles, voisins, proches aidants, jeunes en service civique, bénévoles d’accompagnement en soins palliatifs, membres des équipes citoyennes Monalisa…).
Les enseignements du rapport de mars 2021
- Loin d’être une parenthèse, la crise va avoir des répercussions notables à court, moyen et long-terme.
- Les facteurs socio-économiques et les modes d’habitat ont fortement influencé le vécu de la crise.
- Il subsiste, dans la société française, une vision très négative de la vieillesse.
- La santé psychique est peu prise en compte dans le parcours de soin.
- Conditions de vie, maintien du lien social et vulnérabilités ont un impact fort sur l’émergence d’une fracture intragénérationnelle articulée autour de 4 grandes familles : les fragilisés, les résignés, les résilients, les engagés.
- Si les solidarités citoyennes ont été manifestes pendant le premier confinement, leur pérennité n’est pas acquise et doit être soutenue.
- La socialisation est essentielle dans le quotidien des personnes âgées.
- Le lien à distance ne peut pas remplacer le lien social dans la vie réelle.
- Ce lien social est déterminé par la fréquence des contacts.