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Conférence Nationale du Handicap : quelles perspectives jusqu’en 2022 ?

Conférence Nationale du Handicap : quelles perspectives jusqu'en 2022 (...)

Alors que la loi de référence pour « l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » du 11 février 2005 fêtait symboliquement ses quinze ans, le Président de la République présidait mardi la Conférence Nationale du Handicap afin de rendre compte à mi-mandat des orientations et des moyens de la politique conduite en la matière. En amont de l’évènement, les associations étaient nombreuses à plébisciter un renforcement des engagements de l’Etat sur l’offre d’accueil, la solvabilisation financière, ou encore l’organisation des MDPH, soulevant que « si des avancées ont été réalisées (…) il reste maintenant à passer des droits formels aux droits réels ».

Devant la persistance de familles errant « de guichet en guichet », la longueur excessive des délais d’instruction, un chômage persistant ou encore des discriminations subies par les enfants, le Gouvernement a reconnu que le chemin restant à parcourir était long. Dans la continuité des mesures actées lors du Comité Interministériel du 3 décembre 2019, il s’est engagé à « initier une nouvelle dynamique pour l’acte II du quinquennat » à travers 12 nouvelles mesures assorties d’une enveloppe supplémentaire de 600 millions d’euros. L’Unccas vous propose un retour sur les principaux changements engagés et les perspectives ouvertes pour ces citoyens marqués par la précarisation.

Amélioration des droits et simplification des parcours

RQTH et PCH

En 2020, deux nouveaux droits seront attribués à vie pour les personnes dont le handicap n’est pas susceptible d’évoluer favorablement : la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) (depuis le 1er janvier 2020) et la prestation de compensation du handicap (PCH) d’ici fin 2020.

Pour cette dernière, la barrière d’âge de 75 ans au-delà de laquelle il n’était plus possible de solliciter la prestation, alors même que le handicap était présent avant l’âge de 60 ans, sera supprimée (second semestre 2020).

A compter de 2021, les contours de la PCH vont également évoluer de manière à mieux couvrir les aides ménagères (intégration de la préparation du repas et de la vaisselle dans l’aide à l’alimentation) ou l’assistance apportée par un tiers aux parents en situation de handicap. Des travaux seront également diligentés par le Gouvernement pour une « adaptation effective de la PCH au handicap psychique et aux troubles du neurodéveloppement ».

L’AAH exclue du revenu universel d’activité

Le Chef de l’Etat a écarté l’hypothèse d’une fusion de l’Allocation Adulte Handicapées (AAH), laquelle bénéficie aujourd’hui à 1,2 million de personnes, dans le futur Revenu Universel d’Activité (RUA), répondant positivement à la forte mobilisation des associations.

Des mesures sont également annoncées pour prendre en compte les spécificités du handicap dans le système universel de retraite au bénéfice des travailleurs en situation de handicap mais aussi des parents et proches aidants (des droits à la retraite tiendraient compte des périodes - indemnisées ou non - pendant lesquelles ils ont accompagné leur proche en situation de handicap).

Raccourcir les délais administratifs

En parallèle, le Gouvernement s’engage dans la mise en place d’une « garantie délai pour l’octroi des prestations » afin d’assurer une instruction des demandes inférieure à 3 mois d’ici le 1er janvier 2021. Le chantier propre à la modernisation des Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH) se verra assorti de 25 millions d’euros supplémentaires en 2021 et 2022 « dont 10 millions pour résorber les retards les plus importants dans le traitement des demandes ». Pour sécuriser ce vœu et impulser la transition inclusive, un accord de méthode entre différentes parties prenantes telles que l’Etat, la CNSA, l’Association des Départements de France et les associations du secteur, sera également conclu.

Adaptation de l’offre sociale et médico-sociale

Départs en Belgique

Sur le plan crucial de la lutte contre les départs contraints en Belgique dû au manque de places en France (soit 500 personnes chaque année, avec régulièrement une séparation consécutive des familles et fratries), le Chef de l’Etat a annoncé la création de 1 000 places supplémentaires (dans les régions Ile-de-France, Hauts-de-France et Grand-Est). Elles s’ajouteront aux 2 500 places créées sur l’ensemble du territoire en établissements ou services médico-sociaux pour 2021-2022, dans le cadre du plan national de prévention des départs en Belgique. Si la priorité reste l’inclusion en milieu ordinaire, le Gouvernement précise sa volonté de « garantir le retour vers le milieu spécialisé si nécessaire », par la création de place « de transition, sécurisant les choix des personnes ».

Personnalisation des parcours

La quête vers une meilleure adéquation aux aspirations reste orientée par le soutien au logement « inclusif », ou encore la poursuite de la Réforme SERAFIN-PH. Pour mémoire, cette révision des modalités de financement du secteur spécialisé doit permettre l’émergence de parcours « sur mesure » au profit des enfants et personnes en situation de handicap. Un objectif qui se traduit notamment par la mise à disposition de l’expertise des ESMS spécialistes au bénéfice des acteurs de droit commun (et donc potentiellement des CCAS/CIAS) que ce soit en termes d’accueil, de logement, d’emploi, de service à domicile, etc.

Mieux orienter les personnes et familles

Afin de prévenir l’illisibilité de l’offre pour les personnes et leurs familles, le Gouvernement prévoit la création d’une Plateforme Nationale d’information, d’orientation et de services couvrant l’ensemble des dimensions du parcours de vie (Annonce du handicap, Accompagner son enfant, Scolarité, Formations, Emploi, Aides et droits, Vie sociale…). Et pour « ne laisser aucune personne ni aucune famille sans accompagnement », cette plateforme sera soutenue par la création de 400 équipes de proximité missionnées pour « trouver une solution d’accompagnement aux personnes, éventuellement d’abord temporaire et jusqu’à la solution définitive, en mobilisant les acteurs du territoire, notamment médico-sociaux » (d’ici 2022).

Soutien aux aidants

Ce soutien à l’engagement des proches aidants se traduira également par :

  • La création d’un numéro unique d’appel pour lutter contre leur isolement (Courant 2020) ;
  • Le soutien au déploiement de solutions nouvelles de répit pour les familles ;
  • La création d’une indemnisation de 3 mois pour le congé de proche aidant des salariés, travailleurs indépendants, des fonctionnaires et des chômeurs (Octobre 2020) ;
  • Une défiscalisation, et une exonération totale de contributions sociales pour le dédommagement de l’aidant attaché à la PCH perçu à compter du 1er janvier 2020, avec un cumul possible avec le revenu de solidarité active (RSA) (avril 2020).

Des conditions de vie dignes aux plus jeunes

Concernant la situation préoccupante des plus jeunes, les leviers reposent notamment sur les chantiers liés à la scolarisation inclusive, au dépistage et à l’intervention précoce, ou au dispositif Une réponse accompagnée pour tous.

Le gouvernement affichait sur ce sujet une attitude volontariste résumée par Christèle Dubosc, secrétaire d’État auprès de la ministre des Solidarités et de la Santé : « c’est à notre politique familiale de s’adapter à la réalité des familles, et pas l’inverse ».

On note notamment l’extension des critères du « Bonus Inclusion Handicap » depuis le 1er janvier 2020, au-delà des seuls enfants bénéficiaires de l’AEEH pour renforcer l’inclusion des plus jeunes dans les établissements de la petite enfance. L’enjeu est de permettre aux professionnels de l’enfance de mieux s’occuper de jeunes enfants présentant certains troubles dont la reconnaissance du handicap peut intervenir plus tardivement par la MDPH.

En complément des mesures initiées, sont également projetées :

  • la création d’11 000 postes supplémentaires d’accompagnant d’élève en situation de handicap (AESH) en 2020 ;
  • la création de 45 unités d’enseignement autisme supplémentaires à celles annoncées par la stratégie dédiée, soit 270 au total ;
  • l’extension du forfait précoce jusqu’aux douze ans de l’enfant, avec inclusion du dépistage et de la prise en soins des troubles Dys (au 1er janvier 2021) ;
  • le déploiement en 2020 d’équipes mobiles départementales, croisant expertise de protection de l’enfance et protection médico-sociale, afin de mieux accompagner et prendre en compte les besoins particuliers des enfants handicapés confiés à l’aide sociale à l’enfance (ASE) ;
  • l’engagement d’une réflexion devant aboutir avant 2022 pour une meilleure prise en charge par l’Assurance maladie des parcours de soins de « rééducation », sans reste à charge pour les familles ;
  • la construction d’une « boite à outils » à destination des organisateurs d’activité, des communes et des intercommunalités pour contribuer au « 0 refus d’accueil » dans les activités péri et extrascolaires , en lien avec les pôles d’appui déployés par la branche famille.

Inclusion des travailleurs dans la Fonction publique

En matière d’emploi, le Gouvernement a rappelé sa volonté de promouvoir l’apprentissage, l’accessibilité de l’enseignement supérieur, l’emploi adapté tel que programmé dans sa Stratégie « Osons l’emploi ». Côté collectivités, l’année 2020 sera plus particulièrement marquée par la mise en œuvre des changements opérés par la loi n° 2019-828 de « Transformation de la fonction publique » du 6 aout 2019, avec notamment :

  • l’obligation pour l’employeur de permettre aux travailleurs en situation de handicap de développer un parcours professionnel, d’accéder à des emplois de niveau supérieur, de bénéficier de formations adaptées à leurs besoins tout au long de leur carrière professionnelle ;
  • la présence de « référent handicap » chargés d’accompagner les agents tout au long de leur carrière et de coordonner les actions menées en leur faveur par leur employeur ;
  • la portabilité des équipements contribuant à l’adaptation des postes de travail ;
  • des expérimentations en matière de titularisation des apprentis en situation de handicap ou encore de détachement et d’intégration permettant l’accès à un corps de catégorie ou de niveau supérieur pour les fonctionnaires handicapés dans les trois versants de la fonction publique.

Contact

Florence Angier
Juriste et chargée de mission « handicap – politiques sociales »
fangier@unccas.org

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