Chantier de formation aux métiers de cuisine de la rue

Insertion sociale et professionnelle
Publié le 1 septembre 2009
L’atelier de cuisine nomade est né sous l’impulsion combinée du chef étoilé, Thierry Marx, soucieux de développer une alternative à la « malbouffe », et du maire de Blanquefort, Vincent Feltesse, désireux d’aider les personnes sans emploi à réaliser leur projet. Le CCAS, porteur de la démarche, joue un rôle de coordination. Une formation, rémunérée et qualifiante, aux métiers de la cuisine de rue est ainsi proposée à des personnes orientées par Pôle Emploi ou la mission locale. Le but est de les accompagner vers la création d’entreprise, tout en développant une cuisine saine, de qualité, et favorisant des circuits courts d’approvisionnement.

Elements clés

Contexte

« Quand j’aurai ma troisième étoile, j’ouvre un kébab ! », confiait, en 2005, Thierry Marx, chef étoilé, à Vincent Feltesse, maire de Blanquefort et président de la communauté urbaine de Bordeaux. Quatre ans plus tard, Thierry Marx, désireux de développer une alternative à la malbouffe et Vincent Feltesse, cherchant à aider les personnes sans emploi à réaliser leur projet, lancent conjointement un projet de réinsertion professionnelle : une formation aux métiers de la cuisine de rue, visant à accompagner vers la création d’entreprise des demandeurs d'emploi, tout en les aidant à élaborer une cuisine saine et de qualité privilégiant des circuits d’approvisionnement locaux.A Blanquefort, l'évolution du nombre d'inscrits à Pôle emploi connait une évolution importante, principalement chez les 15-24 ans et les plus de 50 ans. La prolongation significative de la durée d'inscription à  Pôle Emploi de ces derniers traduit une sortie du chômage de plus en plus difficile. Par ailleurs, secteur de la restauration est en recherche permanente d’une main d’œuvre qualifiée. 54 000 postes n’ont pas été pourvus en 2010. Le secteur de la restauration rapide est tout aussi dynamique, créant chaque année 8 000 à 10 000 emplois.

Le pari lancé par les deux hommes se veut donc une réponse originale pour réinsérer des demandeurs d'emploi.

Entièrement porté par le CCAS de Blanquefort, ce dispositif a reçu le soutien de l’ensemble des partenaires locaux et institutionnels, facilitant ainsi la mise œuvre rapide et efficace de ce chantier de formation. Par ailleurs, le CCAS gère en direct le fonctionnement du restaurant d’application "atelier de cuisine nomade".

Description


Présentation de l'action


La formation aux métiers de la cuisine de la rue s'adresse aux personnes sans emploi. Il s'agit d'une formation de 5 mois, rémunérée et qualifiante, délivrant le titre professionnel d'agent de restauration. Elle a pour objectifs de : - favoriser une insertion durable pour les personnes recherchant un emploi, - former à la création d’entreprise (accompagnement à la création et à la gestion d’une activité commerciale, mise en pratique au sein du restaurant d’application et test des plats qu’ils envisagent de commercialiser), - développer une cuisine de rue de qualité (éducation au goût, prévention en matière de santé, promotion de produits issus de l’agriculture locale cultivée de manière raisonnée). Elle se déroule en 4 temps : - cours de cuisine, de gestion des règles d’hygiène et de sécurité dispensés par le lycée hôtelier Saint-Michel de Blanquefort, pour une période de 2 mois, - accompagnement à la création d’entreprise par l’ADIE pour une période d’un mois en collectif suivi d'un accompagnement individuel, - mise en situation pratique au sein d’un restaurant d’application, ouvert au public quatre midis par semaine, pendant un mois, - stage en entreprise durant un mois. Chaque année, le CCAS organise trois sessions, chacune accueillant sept stagiaires. Les candidats sont des demandeurs d’emploi ayant à cœur de créer une activité dans la restauration. Ils sont orientés vers cette formation par divers organismes (Pôle emploi, mission locale, PLIE, AGI). La sélection des candidats est réalisée par un jury présidé par Thierry Marx.  La motivation du candidat, l’identité de son projet, sa qualité et sa faisabilité sont les principaux critères de sélection. A l'issue des cinq mois de formation, l’évaluation des candidats est réalisée par un comité pluridisciplinaire. Pour obtenir leur diplôme, les candidats doivent passer une épreuve professionnelle pratique, présenter leur projet de création d’entreprise et l'analyser.

Moyens


Moyens humains : Les cours et l'accompagnement sont dispensés par les enseignants du lycée et l'ADIE. Néanmoins, le CCAS réalise un suivi du projet et des candidats. Il les accompagne également lors de la mise en pratique au restaurant d'application. - un agent chargé du suivi du projet, - un encadrant technique au restaurant d'application (1 ETP), - des intervenants extérieurs. Dépenses globales : 148 500 eurosDépenses pédagogiques : 101 500 euros - frais de lycée : 44 000 euros (pour dispenser les cours, suivi pédagogique, utilisation des locaux), - ADIE : 18 000 euros (pour dispenser les cours et l'accompagnement individuel), - encadrement technique au restaurant d’application : 30 500 euros, - intervenants extérieurs : 2 500 euros, - suivi par le CCAS : 6 500 euros.

Dépenses de fonctionnement : 16 000 euros. Dépenses de matières premières : 31 000 euros.


Partenaires opérationnels


Lycée Saint Michel et l'association pour le droit à l’initiative économique (ADIE).

Ils financent l'action


Conseil régional d’Aquitaine,  conseil général de la Gironde,  Ville de Blanquefort, CCAS de Blanquefort, ministère de l’Agriculture (Direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt).

Bilan

Les points positifs : Pour l’année 2009-2010, sur 20 stagiaires, 6 ont créé leur entreprise, 8 ont trouvé un poste de salarié et 4 sont en recherche de locaux ou de financement. Ce projet peut être considéré comme un véritable outil d’insertion. Tous les stagiaires ne créeront pas leur activité, mais ils auront profité de cette formation pour affiner leur projet de vie. Sur l’année 2010-2011, 20 stagiaires sont en cours de formation. Le restaurant d’application "atelier de cuisine nomade" est performant puisqu’il répond aux besoins de formation des stagiaires et aux attentes des clients. La fréquentation a largement dépassé les prévisions, puisqu’en moyenne, 50 couverts sont servis chaque midi sur les 13 prévus initialement. Le restaurant d’application est également sollicité par les partenaires locaux pour organiser les repas lors de manifestations diverses.

Cette formation a permis aux stagiaires de prendre confiance en eux, puisque chaque stagiaire développe son propre projet. Le type de cuisine envisagée est expérimenté au restaurant d’application. Ils sont également mis en valeur en passant du statut de chômeur à celui de restaurateur, les citoyens de la commune pouvant venir déjeuner au restaurant d’application. Enfin, ce dispositif a permis de mettre en place un partenariat fort avec les acteurs locaux (notamment les lycées agricole et hôtelier). Le restaurant d'application privilégie les circuits courts d'approvisionnement en fruits et légumes. Blanquefort a la chance d'être situé près d'une zone maraîchère importante. Certains produits viennent notamment d'un chantier de formation aux métiers du maraîchage organisé à Eysines (porté par le lycée agricole de Blanquefort).

Les difficultés rencontrées : Le CCAS doit maintenir une communication suffisante afin de permettre un nombre satisfaisant de candidats ayant un pré-projet professionnel en adéquation avec la formation proposée. La commune a fait l’acquisition et a réhabilité un lieu central pour le restaurant d’application. Le CCAS a investi pour équiper ce lieu de matériel de cuisine aux normes. Il a également recruté un encadrant technique à temps plein pour faire vivre le restaurant d’application et encadrer les stagiaires. Une nouvelle dénomination du diplôme délivré a dû être proposée entre la première et la deuxième année, impactant une redéfinition de la formation, afin de satisfaire aux conditions d’examen, passant ainsi d'un certificat de qualification professionnel au titre professionnel d’agent de restauration.

Observations

Unique en France, cette formation innovante est portée par le CCAS de Blanquefort qui pilote la démarche et gère le restaurant d’application.Ce modèle de développement a fait ses preuves. Le chantier de formation entamera, en septembre 2011, sa troisième année de fonctionnement. Il répond à un fort besoin de main d'œuvre dans ce secteur. C'est un secteur d'activités qui a du mal à recruter, et cette formation, de courte durée, répond à ce besoin de personnes qualifiées. De plus, les porteurs de projets de création d'activité immédiate ainsi que ceux dont on sait qu'ils passeront par une phase de salariat, intègrent durant cette formation, la contrainte économique nécessaire au fonctionnement d'une activité.

L’utilisation de produits de bonne qualité permet à la fois de dynamiser le secteur maraîcher local mais également de préparer les stagiaires à concevoir et expérimenter des plats sains et de saison. Cette dimension environnementale ajoutée à  la dimension sociale et économique du projet en fait un modèle de développement social durable.

Ce concept permet d’associer de façon pertinente l’insertion professionnelle durable des personnes à la recherche d’un emploi, les exigences du marché du travail, l’utilisation de produits issus de l’agriculture locale cultivés de manière raisonnée et la promotion d’une alimentation saine et équilibrée. Il peut être reproduit à l’identique dans toute commune disposant dans son environnement proche d’un organisme de formation dans la restauration.

Photo : Wikimedia Commons / joel camelot

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