Aide aux victimes : mieux préparer les travailleurs sociaux

Organisation et fonctionnement du CCAS
Publié le 24 octobre 2016
L'UNCCAS a rencontré mercredi 19 octobre Juliette Méadel, Secrétaire d'Etat chargée de l'Aide aux Victimes, en vue d'un projet de convention pour aider les CCAS et CIAS à mieux répondre aux habitants en cas de catastrophe naturelle, voire d'attaque terroriste.
Comme l'ont tragiquement montré les attaques de novembre 2015 à Paris et de juillet 2016 à Nice, ainsi que des catastrophes naturelles telles que les inondations de juin dernier, si la France est organisée pour prendre en charge les urgences sanitaires, en cas de situation engendrant des victimes de masse, la réponse sociale à ces situations d'urgence apparaît aujourd'hui insuffisamment organisée.

Une organisation spécifique nécessaire


Ces événements sont tout d'abord exceptionnels en raison du nombre de personnes qu'ils concernent. A Nice, on a pu dénombrer 84 victimes lors de l'attaque du 14 juillet, mais ce sont des centaines de personnes qui ont directement été concernées : proches et parents, témoins... Touchées par le deuil, le traumatisme, elles doivent parfois faire face à une diminution de leurs ressources, à des démarches administratives complexes voire à des situations mettant à mal leur insertion sociale. Les CCAS, jouant à plein leur rôle de premier accueil, doivent donc tout d'abord faire face à cet afflux de demandes.

Traumatisées par ce qu'elles ont vécu, parfois matériellement ou psychologiquement en incapacité de prendre en charge les démarches nécessaires, ces personnes ont également des besoins différents des publics habituels des CCAS/CIAS, en termes d'accueil. Leurs témoignages de l'horreur qu'elles ont vécu, qu'elles partagent nécessairement avec les travailleurs sociaux, rendent plus difficile la distanciation que ces derniers parviennent au quotidien à établir avec leurs interlocuteurs. D'où le besoin d'un suivi psychologique, des victimes mais aussi des travailleurs sociaux eux-mêmes, auquel répondent aujourd'hui les CCAS/CIAS dans l'urgence : suite aux attentats, le CCAS de Nice a ainsi intégré tous les personnels de mairie et les travailleurs sociaux à des groupes de parole avec des psychologues.

Enfin, la gestion de ces urgences exceptionnelles ne doit pas empêcher les CCAS et CIAS de gérer les situations quotidiennes - précarités économique et sociale, problèmes de logement, aide alimentaire... - qui relèvent souvent, elles aussi, de l'urgence pour les personnes qui les subissent. Nombre de CCAS de petites communes du Loiret, de Seine-et-Marne, du Val-de-Marne ont ainsi été contraints, lors des inondations de juin 2016, de gérer prioritairement l'hébergement et l'accompagnement des victimes, prenant du retard dans leurs autres dossiers et se trouvant en difficulté pour rattraper cette situation.

Les catastrophes touchent en effet tour à tour de grandes villes, bénéficiant d'un fort contingent de travailleurs sociaux, mais aussi de petites communes qui parfois n'en emploient pas du tout, comme cela avait été le cas de certains villages des Alpes Maritimes touchés par les terribles orages d'octobre 2015.

Un projet de convention pour y répondre


Première piste pour répondre à ces problématiques : un rapprochement entre ll'UNCCAS et le Secrétariat national d'Aide aux Victimes, qui débouchera sur une convention au début de l'année 2017. Comme l'a souligné l'UNCCAS, ce travail méritera probablement d'entrer également en résonance avec les Etats Généraux du Travail Social menés en 2014 et 2016.

Trois volets ont été discutés le mercredi 19 octobre :

1/ Former les travailleurs sociaux


Les compétences techniques nécessaires en cas de catastrophe (connaissance des fonds mobilisables, des interlocuteurs à contacter...) apparaissent insuffisamment abordées dans la formation initiale des travailleurs sociaux. Il conviendrait d'y remédier :

  • en revoyant ces cursus initiaux,
  • en déployant des dispositifs de formation continue pour mettre à niveau les travailleurs sociaux actuellement en poste.

2/ Recueillir et adapter les bonnes pratiques des autres secteurs


De nombreux acteurs sont organisés pour faire face à l'urgence : des Sapeurs-Pompiers à la Police, en passant par l'ensemble des structures faisant face aux urgences sanitaires (SAMU, Hôpitaux, etc.). En cas de catastrophe de masse, ils disposent de procédures pour réagir efficacement, ce qui n'est pas le cas - aujourd'hui - de la plupart des CCAS et CIAS.

L'UNCCAS et le Secrétariat national d'Aide aux Victimes pourraient s'appuyer sur ces connaissances et ce savoir-faire pour les adapter au champ social. Une collecte des bonnes pratiques est donc en cours, qui pourrait donner lieu à un guide adressé aux élus et professionnels, tenant compte des problèmes juridiques particuliers de l'action sociale locale (comment, par exemple, accompagner les victimes lorsqu'elles ne résident pas dans la commune où a lieu la catastrophe..).

3/ Tenir compte des disparités territoriales


Pour anticiper les difficultés particulières auxquelles sont confrontées les petites communes en cas de catastrophe (ou des spécificités juridiques comme le principe de spécialité territoriale, par exemple), il est nécessaire de trouver des solutions pour mobiliser rapidement des travailleurs sociaux en renfort. Par le passé - comme lors des orages d'octobre 2015 - le rôle des Unions départementales a pu se révéler précieux, permettant le redéploiement temporaire de personnels des villes en zone rurale.

Il s'agirait, dans le futur, de cadrer le déploiement en urgence de ce type de force opérationnelle (task force), en s'appuyant sur le volontariat des travailleurs sociaux.

Des échanges transversaux dans un groupe de travail national


L'UNCCAS est engagée depuis plusieurs mois dans des réflexions sur ces sujets et a déjà organisé des échanges impliquant le CAS de Paris et le CCAS de Nice, touchés par le terrorisme, le CCAS de Villeneuve-Saint-Georges, impliqué lors des inondations, mais également Guy Laurent, Président de l'Union départementale des CCAS de Haute-Garonne, témoin en 2001 de l'accident de l'usine AZF de Toulouse qui avait touché 28 000 ménages.

Des échanges avec Françoise Rudetzki, fondatrice de SOS Attentats, ou Suzanne Tartière, médecin régulateur au Samu de Paris, qui est intervenue lors du Congrès 2016, ont permis d'apporter de premières réponses.

Un groupe de travail réunira à nouveau ces interlocuteurs fin 2016 pour valider les orientations de l'UNCCAS et finaliser le projet de convention envisagé pour janvier.

A lire à ce sujet


L'interview de Benoît Calmels, délégué général de l'UNCCAS, dans le Guide Familial

Photo : de gauche à droite, Yves Jacomet, Directeur de cabinet de la Présidente de l'UNCCAS, Joëlle Martinaux, Présidente de l'UNCCAS, Juliette Méadel, Secrétaire d'Etat chargée de l'Aide aux Victimes, Benoît Calmels, Délégué général de l'UNCCAS.

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